Only One - Clayton : Chapitre 5
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La fin de sa phrase reste en suspens un moment et je laisse tomber mes chaussettes à terre. Ces quelques mots entrent et sortent dans mon cerveau sans que je ne les comprenne. Je scrute le visage angélique de Lorelei, m’attendant à voir un signe qui trahirait une blague pas franchement marrante, mais je ne vois rien d’autre que le reflet de mon propre visage dans ses yeux.
Lo baisse la tête, coupable. Je n’y crois pas. Ce qu’elle dit n’a aucun sens. L’absurdité de ses propos me frappe avec une évidence presque douloureuse.
- Non, ce n’est pas toi Lo, dis-je doucement pour ne pas me faire entendre de Steve dans la salle de bain. Tu es adorable mais il n’est pas nécessaire que tu me mentes pour que je te protège, tu le sais bien. Tu étais à mon chevet quand il est tombé. Ça ne peut pas être toi, ma puce. Mais je comprends l’intention de ton mensonge.
- Ce n’est pas un mensonge ! s’énerve Lo en frappant ses cuisses de ses petits poings.
- Lo, je sais que ce n’est pas toi. Arrête de…
- C’est moi qui l’ai tué, Clay !
- Ça suffit Lorelei ! dis-je autoritaire. Ton mensonge ne tient pas la route, admets le et tout sera fini. Je ferais comme si tu ne m’avais jamais rien dit si tu veux. C’est impossible que ce soit toi, princesse, j’ajoute en lui caressant la joue d’un revers de main.
- Et pourquoi ? demande-t-elle violement.
- Parce que tu étais à l’infirmerie quand il est tombé !
- J’étais à l’infirmerie quand il est tombé oui. Pas quand il est mort.
- Comment ça ? je demande, l’estomac retourné par un horrible soupçon.
- Je veux dire qu’il ne s’est peut-être pas tué en tombant mais qu’il était mort avant sa chute.
- Lorelei, qu’as-tu fait…
Ma voix n’est plus qu’un murmure. Mon souffle se perd et la chambre autour de moi commence à tanguer. Je cherche à tâtons le matelas de Michael et m’y assoie en cramponnant le drap.
- T’es fâché ?
- Je… J’en sais rien, Lo. Mais…
Tellement de questions se bousculent dans ma tête que je ne sais pas par où commencer. Mes idées s’emmêlent et les mots ont des difficultés à trouver la sortie.
- Mais comment as-tu… comment as-tu put le tuer ? je demande finalement, abasourdi. Il avait nettement l’avantage sur toi.
- Non. C’est ce que tout le monde pense. Il faisait quoi ? Quarante centimètres et autant de kilos de plus que moi ? C’est sans importance tout ça. Pris par surprise même un ours peut se faire avoir par le cerf.
- Pourquoi me parles-tu d’ours et de cerf ?
- L’ours c’est Michael. Et moi le cerf, répond-elle doucement.
- Pourquoi un cerf ? Ce n’est pas bien dangereux.
- Un cerf à des bois. C’est joli. Jusqu’à ce qu’il les utilise pour embrocher ses ennemis. Et là c’est moins sympa et l’ours se méfie du cerf. Ma mère me disait toujours qu’il ne fallait pas juger un livre à sa couverture.
Je médite ce qu’elle vient de dire. Des images d’Emily refont surface et je ne peux qu’être d’accord avec Lo. Jamais nous nous ne serions doutés que notre petite Emily pouvait être aussi dévastatrice. Je suppose que c’est pareil pour Lorelei.
Sans que je la questionne d’avantage elle continue son récit, sans toutefois me regarder.
- C’est lui qui avait saboté le pseudo-Sérum que l’infirmier t’avait injecté la première fois. Je l’ai surprit en train d’en parler au vieil entraîneur hier après que l’assistante de l’infirmier ne me vire de l’infirmerie. Il avait dû préméditer son truc. Il te frappait assez pour te faire très mal mais pas suffisamment pout te tuer, puis il comptait sur la générosité de l‘infirmier pour vite s’occuper de toi et t’injecter le « Sérum » et tu tombais après dans le coma. Je ne sais pas comment il s’y est prit pour changer le liquide ni comment il a fait pour se le procurer mais je suis presque certaine que le vieil entraîneur a quelque chose à voir là-dedans.
Lorelei fixe le sol d’un air songeur en se mordillant la lèvre inférieure. Moi, je me contente de la regarder sans arriver à comprendre que l’ange assis à côté de moi ait pu faire une chose aussi atroce.
- Bref, reprend-elle en secouant la tête. Quand j’ai sut pour le sabotage j’ai rien dit à personne. Je ne pense d’ailleurs pas que Steve soit au courant de cette histoire. Michael a dû agir sans lui en parler. J’ai attendu dans la chambre que Michael rentre de son entraînement. Puis quand j’ai entendu sa voix dans le couloir je me suis cachée derrière la porte. Quand il est entré j’ai pas bougé. Puis il a dû sentir que quelque chose clochait parce qu’il s’est rapidement retourné en brandissant ses poings. Il a pas vraiment eu le temps de comprendre ce qui lui arrivait. Je lui ai sauté dessus et le choc l’a jeté au sol, juste là, dit-elle en montrant un côté de la pièce. Puis avant qu’il riposte j’ai prit la lampe de chevet de mon lit et je lui ai abattu sur le crâne. Plusieurs fois en fait. Jusqu’à ce qu’il soit KO. Puis je l’ai retourné sur le ventre et j’ai dévissé un barreau de mon lit. Et j’ai commencé à lui frappé la nuque jusqu'à ce qu’un craque résonne. J’ai fait pareil pour ses membres. Puis quand j’ai fini j’ai regardé son corps immobile sur le sol, m’attendant à ressentir de la pitié ou quoi que ce soit mais rien. Je ne ressentais rien. Même pas de la joie. J’avais juste l’impression d’avoir fait quelque chose qu’il fallait faire. Puis j’ai profité de ce que personne ne rôdait plus en SDE pour trainer son corps là-bas. Je l’ai accroché ensuite à l’une des cordes qui pendent au plafond et je me suis servit du système de poulie pour le hisser tout là-haut. Je pensais le cacher là en attendant l’arène. Je ne m’étais pas attendu à ce qu’il se décroche si vite. et sa chute l’a encore plus endommagé, au final.
- C’est pas vrai… Lo, si ils découvrent que c’est toi…
- Ils ne feront rien. C’est pas interdit. Le but c’est juste de tuer des gens. Ils s’en fiche de comment tu fais. Et je l’ai tué pour toi, tu sais.
Les joues de Lo s’empourprent et elle me glisse en regard timide.
- Pour moi ?
- Il était trop dangereux, j’avais peur qu’il te tue avant l’arène. Puis je veux que ce soit toi qui gagne Clay.
- Quoi ? Non, ne dis pas ça ! dis-je en m’emparant de ses mains. Bat-toi, Lo !
- Je vais me battre. Pour toi.
- Lorelei, tu n’as pas le droit de dire ça ! Bat-toi pour toi, pour ta propre vie !
- Alors que toi tu ne te bat que pour les autres et pas pour toi ?! Clay, je ne peux pas gagner ! Je ne suis pas aussi forte que ta sœur. La petite d’il y a deux ans, Emily. Je ne passerais pas le Tri, je le sais, c’est pas la peine de se voiler la face. Alors je veux faire le ménage et enlever les plus dangereux. Pour toi.
Je ne sais pas quoi répondre à ça. En effet, comment interdire à quelqu’un de faire quelque chose que l’on fait soi-même ?
Je lâche les mains de Lo, et passe les miennes sur mon visage pour chasser la fatigue. Même là j’ai encore du mal à y croire. Je sais qu’elle me dit la vérité mais c’est comme si mon cerveau refusait de comprendre l’information. Je ne peux pas accepter l’idée que ce petit bout de femme ait put tuer avec un si grand sang-froid.
- Clay ?
Je tourne la tête vers Lo. Elle s’est mise debout et ses grands yeux bleus me regardent d’un air triste.
- Tu m’en veux ?
- Non, ma puce. Non. C’est simplement… dur… de revenir à la réalité. Je ne suis pas fâché contre toi. Vien là, dis-je en tendant mes bras.
Lorelei grimpe sur mes genoux en m’enlace en plongeant sa tête dans mon cou. Je caresse ses longs cheveux blonds, jouant avec des mèches.
- Tu crois qu’on doit prévenir Steve ?
- Non, je réponds. Mieux vaut ne plus du tout en parler, ma belle.
- C’est ce que je pensais aussi.
Elle me fait un bisou sur ma joue couverte d’une barbe naissante et se blotti un peu plus contre moi.
Je n’arrive pas à y croire. Tout ça. Only One, Emily, Michael. Tout est trop dur pour être vrai. Et Lorelei…
Je réalise que ce petit bout de femme ne sera plus là dans trois jours. J’ai été stupide d’y croire. Je ne passerais pas la Tri et même si j’arrivais à faire en sorte qu’Lorelei parvienne à passer le Tri, elle ne survivra pas à la suite. Elle ne pourra pas gagner en duel. C’est impossible. Peut-être est-il plus humain de la laisser mourir dans l’arène ? Certainement. Mais je ne supporterais pas de la voir se faire tuer, c’est plus fort que moi. Il n’y a donc qu’une seule solution.
La tuer moi-même.
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